lundi, décembre 11, 2017

Il faut prendre M. Blanquer au sérieux


Retour sur la stratégie de communication de Jean-Michel Blanquer et message aux enseignants.

On aurait tort de prendre les propos tenus par le Ministre dans l'émission "Le Grand Jury" du 10 décembre 2017  (et dans bien d'autres médias) comme un discours excessif et ignorant des réalités des enseignants. Dire qu'il se "ridiculise" n'est pas non plus très pertinent. 
La stratégie de Jean-Michel Blanquer est, au contraire, réfléchie et redoutablement efficace. 

Il considére que les critiques qui lui sont faites (par des personnes comme moi ou d'autres... ) sont l'expression d'un "microcosme". Et d'une certaine manière, il a raison. Sa communication ne vise pas de manière directe les enseignants. Et ceux qui s'indignent et réagissent sur les réseaux sociaux sont une infime minorité. On peut même penser que malgré quelques erreurs, ses propos séduisent une bonne partie des enseignants eux-mêmes. 

Il a l'opinion publique avec lui, c'est indéniable. Les sondages d'opinion le montrent. C'est un des ministres qui a su émerger de l'anonymat du gouvernement. Et il suffit de tendre l'oreille hors de notre "bulle informationnelle" des réseaux sociaux pour se rendre compte que sa notoriété est bonne. Il a l'image d'un "expert"qui sait de quoi il parle. Et ses propos eux-mêmes, qui relèvent pour une bonne part d'un "populisme éducatif", séduisent et résonnent auprès d'un électorat de classe moyenne et populaire qui a pu être déboussolé par la politique menée précédemment. 

Qu'importe alors qu'il enfonce des portes ouvertes, préconise des mesures infaisables ou invente des dispositifs qui existent déjà... Ça n'imprime pas auprès de l'opinion et des médias. 
Pourquoi ? D'abord parce que les questions éducatives (je l'ai déjà écrit dans d'autres textes) sont mal traitées dans les médias généralistes. Les journalistes éducation y sont rares et pas assez écoutés. Et puis, la nuance, la remise en contexte, la vérification, ce n'est pas "sexy" et ça prend du temps alors qu'il y a bien d'autres sujets à traiter... 
Et surtout parce que M. Blanquer fournit ce que l'opinion a envie d'entendre. Il joue sur le"biais de confirmation" avec un discours de restauration (de l'uniforme, de l'autorité, des méthodes de lecture) qui rentre parfaitement en résonance avec la vision nostalgique et de déploration qu'on trouve chez les 67 millions d'experts de l'école que sont les français...
Enfin, cette mise à l'agenda est aussi un moyen de détourner le regard de sujets plus importants.

Même si nous, nous savons, que les choses sont plus compliquées que cela, qu'il faut nuancer... Et aussi, parce que nous sommes sur le terrain et savons quels sont les manques et les besoins... Mais il est difficile de se faire entendre dans ces conditions face à un tel rouleau compresseur...

C'est l'enjeu de la période qui vient. Être capable de toucher l'opinion et de déconstruire les fausses évidences. Trouver l'antidote à l'intox et à la démagogie. Questionner l'argument de la "science" et opposer une expertise à une autre.
Mais je ne pense pas que ce soit en s'indignant et en faisant de l'humour facile (même si j'y succombe moi aussi...) qu'on y parviendra. Il faut vraiment construire une réponse à la mesure de l'enjeu de cette  nouvelle idéologie scolaire. 

Il faut prendre Monsieur Blanquer au sérieux.


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dimanche, novembre 05, 2017

Une première biennale mais pas la dernière #BIEN17


#BIEN17 jour 4 dimanche 5 novembre (dans le TGV Poitiers-Paris)

Voilà, c’est fini...🎶 La première biennale internationale de l’éducation nouvelle s’est achevée par un discours de clôture combattif et volontiers provocateur de Philippe Meirieu.
Le terme de bilan serait excessif. Je propose quelques impressions à chaud de cet évènement qui rassemblait six mouvements se réclamant de l’éducation nouvelle. Avec deux questions en tête. D’abord celle de la diversité et de l’unité de ce mouvement. Et puis celle de savoir si cette éducation est toujours nouvelle.   



Diversité et unité de l’éducation nouvelle
Comme je l’ai déjà rappelé dans mon premier billet, j’ai pour particularité d’avoir été adhérent ou très proche de plusieurs organisations (Cemea, Crap et Fespi...). Mais je ne suis pas exceptionnel et j’ai pu constater dans les échanges durant cette rencontre qu’il y avait une certaine porosité entre nos mouvements. Un(e) militant(e) d’une organisation a pu, dans son parcours, croiser le chemin d’autres associations.
C’est peut-être la première chose que je voudrais retenir de cet évènement. On a su travailler ensemble même si ce n’est pas toujours simple. Je regrettais dans le billet qui introduisait cette série les logiques de « boutique ». Elles existent indéniablement, tout comme il y a des cultures propres à chaque organisation. Mais la biennale a été un point de rencontre qui a permis dans les ateliers et des moments informels de dépasser ces instincts grégaires (et compréhensibles).
Lorsque j’étais président du CRAP, j’ai beaucoup œuvré pour qu’on aille vers une mutualisation de nos moyens (humains, matériels,...) dans une logique d’économie d’échelle mais sans beaucoup de succès. On peut espérer qu’à l’image du comité de pilotage ou de l’équipe d’accueil, cette logique de mutualisation et de coopération soit relancée.
Alors, tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ? Même si on a envie de ne retenir que les bons moments, en fait, cet évènement a été le révélateur de ce qui fait à la fois l’unité mais aussi la diversité et l'hétérogénéité de ces mouvements d’éducation nouvelle. Il y a de tout, du bon et du moins bon, ce qui me plaît et ce qui m’agace. Dans les 230 personnes présentes et dans les organisations participantes, on peut discerner des différences dans les centres d’intérêt, les postures, les histoires personnelles.
Ceux pour qui l’École est le lieu principal d’action, d’autres qui envisagent l’éducation dans le cadre du péri-scolaire ou des vacances... Ceux qui ont des certitudes et ceux qui ont des convictions mais pas de certitudes (devinez ceux que je préfère...), des dogmatiques et des pragmatiques, des sentencieux et d’autres qui doutent,  ceux qui ont de la méfiance pour les technologies et ceux qui voient le numérique comme un outil pédagogique parmi d’autres, ceux qui se méfient des neurosciences et ceux qui les voient comme une source d’information parmi d’autres,  ceux qui se situent dans une sorte de pureté radicale par rapport à la «marchandisation» et ceux qui la voient comme une réalité avec laquelle il faut composer, des “révolutionnaires” et des réformistes, des jeunes (beaucoup) et des vieux, des chevelus et des pas chevelus (devinez où je me situe !)...



L’Education toujours nouvelle
Mais au delà de ces différences, il y a aussi des valeurs en partage. Une indignation devant les inégalités sociales et une conviction profonde qui est celle que l’éducation peut contribuer au progrès humain et que l’éducation doit être celle de tous par des pratiques de coopération. Toutes les personnes qui étaient rassemblées à Poitiers malgré les petites critiques que je formule ont pu débattre durant ces quatre jours dans une sorte de « solidarité critique » pour reprendre une expression du sociologue Bruno Latour cité par Philippe Meirieu. L’éducation nouvelle pose plus de question qu’elle ne fournit des réponses prêtes à l’emploi...
Rien de pire que le pédagogue qui dirait avoir, une fois pour toutes, LA solution ! La pédagogie, nous disait Philippe Meirieu dans sa conférence de clôture, refuse tout « applicationnisme » systématique et promeut toujours des débats pédagogiques inventifs

Un mini débat a couru durant cette biennale : faut-il changer le nom de cette éducation nouvelle alors que c’est sa dénomination depuis 150 ans ? On pourrait se dire que le fait de continuer à la qualifier de « nouvelle » après tout ce temps est une forme d’échec et devrait nous interroger.
Pour Philippe Meirieu citant Gaston Mialaret, ancien président du GFEN, l’éducation nouvelle sera toujours nouvelle car elle doit s’adapter sans cesse aux enjeux du monde contemporain et aux apports de la science. C’est cette adaptation et ce questionnement permanent qui en fait la « nouveauté » ou plutôt le renouvellement.
Le danger serait celui de se transformer en « musée » de la pédagogie où le dogmatisme et l’application de procédures figées l’emporteraient sur l’expérimentation et l’esprit de recherche.

Des convictions mais pas de certitudes...
Une éducation nouvelle toujours en mouvement pour le 21ème siècle.
A bientôt pour le deuxième biennale ? 

Philippe Watrelot
Le 5 novembre 2017


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Les billets consacrés à la Biennale internationale de l’éducation nouvelle
Billet n° 2 : Sciences et pédagogie
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Education Nouvelle, Innovation, Formation #BIEN17



#Bien17  Biennale de l’éducation nouvelle Jour 3 (samedi 4 novembre 2017)



Je propose un troisième billet reposant en partie sur mon intervention à la table ronde sur Éducation Nouvelle et Formation le samedi 4 novembre au matin et sur quelques réflexions sur l'innovation
Deux tables rondes étaient en effet proposées en parallèle. L’une était consacrée à l’innovation et l’autre portait donc sur la formation. On peut s’étonner qu’on m’ait demandé de participer à cette dernière alors que j’ai été président du Conseil National de l’Innovation et de la Réussite Éducative (Cniré) auquel de nombreux membres du Collectif des associations partenaires de l'École ont participé. Je me suis moi même étonné de ce choix des organisateurs... 
Toutefois, j’ai aussi pas mal réfléchi à cette question de la formation comme en témoignent de nombreux billets de blogs. Je vous livre donc mes réflexions sur ces deux sujets.


Innovation : mot piégé
Dans le rapport du Cniré et précédemment dans un article de blog intitulé «École et innovation : je t’aime moi non plus», j’alertais sur les usages et les dangers de cette notion d’innovation. Elle peut être un repoussoir pour bon nombre de collègues lorsqu’elle est vécue comme une injonction un peu vaine à la tonalité « manegeriale ». Elle peut,paradoxalement,  favoriser le conservatisme. Par ailleurs, l’image donnée par les médias est plutôt celle d’enseignants solitaires en lutte contre une administration castratrice ou bien encore d’initiatives privées vendues comme « innovantes ». Alors que les projets présentés durant cette biennale sont des projets collectifs qui s’appuient sur les marges de manœuvre permises (ou conquises) par le système éducatif public.
Incontestablement, pour un observateur naïf, la Biennale serait un rassemblement d’enseignants « innovants ». En tout cas, ça y ressemble. Et un bon nombre des participants, impliqués dans des micro-lycées, des écoles innovantes ou d’autres structures ne rejetteraient pas le terme et l’ont même inclus dans leur sigle. Par exemple la Fespi, un des organisateurs de cette biennale, est la Fédération des Etablissements Scolaires Publics Innovants. 
Toutefois, j’ai la la conviction que ce qui importe c’est plus la démarche de recherche que l’innovation en elle-même. Plutôt que de parler d’« enseignants innovants », il nous semble plus pertinent de parler d’enseignants ou de praticiens dans une démarche de recherche.
« Innover » n’est pas un but en soi mais une démarche au service de valeurs. Au lieu de cette injonction à innover, on devrait parler plutôt de droit à l’expérimentation. Expérimenter, chercher ensemble, s’évaluer, plutôt qu’à tout prix innover…
On pourrait aussi proposer une autre piste en proposant de redonner toute sa place au terme de « progrès » plutôt que d’innovation. Car, ce qui anime les personnes qui s’inscrivent dans ce courant de l’éducation toujours nouvelle après plus de 150 ans c’est plutôt de s’inscrire dans une perspective de progrès humain plutôt que d’innovation sans but ni perspective.
Nous voulons améliorer notre École pour qu’elle puisse travailler plus efficacement au service de la réussite de tous les élèves. C’est parce que la lutte contre les inégalités doit être la priorité absolue qu’il faut innover et construire une école plus efficace.


Formation et éducation nouvelle.
Dans cette démarche de diffusion des pratiques et des valeurs de l’éducation nouvelle, la formation est indispensable. La réflexivité, le travail en équipe, le partenariat, l’écriture professionnelle, le lien avec la recherche pourraient être plus présents dans la formation initiale. Mais la formation continue est encore plus importante.
Mais je voudrais insister surtout sur un aspect qui me semble essentiel et pas assez présent dans les ESPÉ aujourd’hui. C’est celui de la nécessaire pédagogie des moments de formation. C’est une conviction forte et partagée par nos mouvements.
On pourrait la  traduire par une proposition assez simple : on enseigne comme on a été formé et on devrait former comme on voudrait que les gens enseignent. La forme que doit prendre la formation est donc tout aussi importante que le fond. Rien ne sert de faire un cours magistral sur le travail de groupe ! Si l’on veut que le métier change, il ne faut pas seulement enseigner la pédagogie, il faut la faire vivre en ayant des dispositifs de formation qui mettent les stagiaires en situation d’activité. C’est parce qu’ils l’auront vécu dans leur formation qu’ils seront mieux convaincus de leur transférabilité dans leur propre enseignement. C’est ce qu’on résume en général en parlant de principe d’isomorphisme.
Qui formera les formateurs ? Car, au risque de me répéter et de me faire quelques ennemis chez mes collègues, j'ai le sentiment que ce principe est peu appliqué. Et cela pose la question de la formation des formateurs intervenant dans les ESPÉ et de la diversité de leurs parcours. Sur ce point, comme sur d’autres, l’expérience accumulée par les mouvements pédagogiques et les associations complémentaires pourrait être mieux utilisée. Il ne faudrait pas borner ceux ci à un rôle de supplétif comme cela se voit trop souvent aujourd’hui dans la formation.



En tout cas, pour finir sur une note personnelle et un hommage, je dois dire que c’est toute l’éducation informelle et formelle que j’ai reçue dans les différents mouvements pédagogiques et associations dans lesquels j’ai milité qui a construit une bonne partie de ma compétence de formateur. Et au delà, qui m’a construit en tant qu’homme...

Philippe Watrelot
 3 et 4 novembre 2017

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Les billets consacrés à la Biennale internationale de l’éducation nouvelle
Billet n° 2 : Sciences et pédagogie
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vendredi, novembre 03, 2017

Sciences et pédagogie #BIEN17


Biennale de l’éducation nouvelle Jour 2 (vendredi 3 novembre 2017)

Après une première journée marquée par la conférence d’ouverture d’Edwy Plenel et une première vague d’ateliers, la journée de vendredi a commencé par une conférence de Claude Lelièvre qui avait pour thème : “Au regard de l’histoire en quoi l’éducation nouvelle est elle toujours d’actualité ? ”. On peut résumer la thèse qu’il a défendu ainsi. Pour lui, l’Education Nouvelle n’est pas en rupture avec l’école qu’ont voulue les fondateurs de l’école de la 3ème république. L’éducation nouvelle va simplement plus loin dans une « République inachevée » (cf. Plenel). Il a, comme à son habitude, utilisé de nombreuses citations pour étayer son propos. Et il est vrai que certaines avaient une résonnance très actuelle !
Mais je voudrais surtout centrer ce deuxième billet sur un des points que j’évoquais dès hier dans mon premier texte. Il s’agit du rapport de la pédagogie à la science et en particulier dans le contexte actuel de développement des neurosciences, de son usage (ou mésusage) dans les débats et les injonctions ministérielles.

Un atelier (auquel j’ai participé) était particulièrement consacré à ce thème mais on retrouvait aussi cette problématique abordée dans d’autres discussions comme par exemple celle sur les rapports entre la recherche et la pédagogie ou encore celle sur l’accompagnement scientifique des innovations et expérimentations.


Les neurosciences : entre engouement et défiance ?
Les Cahiers Pédagogiques avaient consacré en février 2016 un dossier à ce thème. Les coordonnateurs du dossier, Nicole Bouin et Jean-Michel Zakhartchouk, dans l’avant propos, disaient vouloir se situer entre «défiance absolue ou engouement sans réserve» 
La question qu’ils posaient était aussi celle de savoir comment les neurosciences peuvent éclairer (et faire évoluer) notre pratique dans nos classes et nos établissements. C’est une des questions qui s’est posée dans l’atelier de cette biennale.
J’avais participé il y a quelques semaines à une journée d’études très intéressante organisée par la FCPE. On m’avait demandé de jouer le rôle de « grand témoin » dans un évènement consacré aux neurosciences. J’avais beaucoup apprécié cet exercice et eu le sentiment d’y apprendre beaucoup de choses. J’en avais retiré la conviction que les recherches actuelles confirmaient un bon nombre d’intuitions des pédagogues.
Dessin de Jack Koch paru dans le n° 527 des Cahiers Pédagogiques
Je n’ai pas la prétention, dans ce court billet, de faire le tour de la question. Mais on peut rapidement évoquer quelques pistes. Dans un des articles de vulgarisation les plus célèbres, Stanislas Dehaene présente « Quatre piliers de l’apprentissage » selon les neurosciences : l’attention, l’engagement actif, le retour d’information et la consolidation. On retrouve des pratiques déjà présentes dans les classes mais qui sont confirmées par ces recherches.
L’attention nous renvoie à toutes les pratiques récentes autour de la concentration (voire la méditation) que l’on peut avoir en classe pour permettre aux élèves de canaliser leur attention.
L’engagement actif énonce, au final, quelque chose qu’on retrouve au coeur de l’éducation nouvelle. L’enfant sera d’autant plus actif et engagé quand il aura envie de faire l’action. Cette envie est déclenchée quand l’activité lui plaît, qu’elle importe pour lui, qu’il y voit un intérêt personnel… et non pas parce qu’il y est contraint par un intervenant extérieur.
Recevoir un retour d’information immédiat sur l’action en cours est constitutif de l’apprentissage. Plus le retour est proche dans le temps de l’erreur, plus l’action corrective sera efficace et intégrée de manière pérenne. Les erreurs sont positives et sources d’apprentissage. Le retour d’information insiste donc sur la nécessité d’une évaluation au service des apprentissages ainsi que sur l’importance du renforcement positif.
Selon Dehaene, le point culminant d’un apprentissage est le « transfert de l’explicite vers l’implicite » : c’est l’automatisation des connaissances et procédures. Cette automatisation passe par la répétition et l’entrainement. Elle permet de libérer de l’espace dans le cortex préfrontal afin d’absorber de nouveaux apprentissages. Il est donc essentiel de répéter une connaissance nouvellement acquise.
Par ailleurs, les intervenants à la journée sur les neurosciences évoquée plus haut insistaient sur la plasticité cérébrale. Loin d’un déterminisme ravageur (« tout est joué à ?? ans») , ils nous disaient que le cerveau est extrêmement adaptable et qu’on peut apprendre à tout âge. “Tous capables” comme disent nos camarades du GFEN... On peut évoquer aussi le postulat d’éducabilité cher à Philippe Meirieu.


Quels rapports entre la science et la pédagogie ?
Je citais, dans un billet précédent, la définition de l’Éducation Nouvelle de 1921 qui finit par ces mots : « Le but de l’éducation et ses méthodes doivent donc être constamment révisés, à mesure que la science et l’expérience accroissent notre connaissance de l’enfant, de l’homme et de la société »
Prendre en compte les apports de la science fait donc partie des principes de la pédagogie et de l’éducation nouvelle.  De son côté, Jean-Michel Blanquer affirme, lui aussi vouloir « avancer à la lumière des sciences ». On pourrait donc se réjouir de cette convergence. Alors pourquoi ça coince ?
Car en effet, si la tonalité de l’atelier n’était pas à la défiance évoquée plus haut, on y entendait quand même un peu de méfiance...
Celle-ci tient peut être au fait qu’il y a un mésusage des neurosciences. Elle sont souvent présentées aujourd’hui dans les médias et les discours publics comme une sorte de vérité révélée et une prescription de ce que devrait être la pédagogie dictée par la science.
Et avec cette “mode” et cette pression forte, il est normal que les enseignants se méfient.
Dans un entretien complémentaire du dossier des Cahiers Pédagogiques cité plus haut, les coordonnateurs alertaient d’ailleur sur cette dérive : « On a besoin des sciences non pour dicter notre pratique, mais pour l’éclairer un peu plus. »
Le danger serait en effet celui d’une forme de « scientisme » où la science ne serait plus contestable et l’objet de controverses. La pédagogie n’est pas une science mais un savoir pratique. Mais il ne faudrait pas qu’elle devienne un métier d’exécution où un « bureau des méthodes » dicterait dans une logique taylorienne de travail prescrit, les « bonnes pratiques ».
De plus, il ne faut pas oublier que d’autres sciences nous sont utiles. Les neurosciences nous fournissent des apports éclairants et relativement nouveaux mais elles ne sont qu’une discipline qui étudie notre métier sous un angle, forcément partiel. Mais peuvent-elles, à elles seules, expliquer la complexité de notre travail et de l’acte d’apprendre ? L’élève n’est pas qu’un cerveau mais il est un individu social et qui apprend dans l’interaction. On notera d’ailleurs que certains travaux récents des neuroscientifiques s’intéressent aux vertus de la coopération dans les mécanismes de l’apprentissage.
L’un des risques de la mode des neurosciences est aussi de ne voir l’apprentissage et ses difficultés que sous le seul angle individuel. Et d’ignorer les conditions sociales de l’apprentissage. Neurologie et sociologie sont dans le même bateau, il ne faudrait pas que l’un des deux coule...
« Avancer à la lumière des sciences », l’Éducation Nouvelle en est convaincue depuis toujours mais à la condition que ce soient toutes les sciences et dans un dialogue fécond et mutuel entre les praticiens et les chercheurs, chacun se nourrissant des apports de l’autre.

Philippe Watrelot
Vendredi 3 novembre 2017


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jeudi, novembre 02, 2017

Vous avez dit “éducation nouvelle” ? #BIEN17


Du 2 au 5 novembre se tient à Poitiers la première biennale internationale de l’éducation nouvelle organisée par six mouvements et associations pédagogiques (CEMEA, Crap-Cahiers Pédagogiques, Fespi, ICEM-Pédagogie Freinet, FI-CEMEA et GFEN). Je vais évidemment participer à cet évènement qui va rassembler près de 250 personnes.
C’est pour moi une évidence tant cela correspond à mon histoire personnelle. J’ai milité aux Cemea pendant une vingtaine d’années (dès l’âge de 18 ans) et je suis devenu ensuite adhérent du CRAP-Cahiers Pédagogiques. Pendant ma présidence de cette association, j’ai contribué à entretenir et construire des réseaux avec les autres mouvements pédagogiques et associations complémentaires de l’école pour renforcer ce qui nous rassemble au delà des logiques d’appareils. C’est donc un courant de pensée qui se réunit à Poitiers et aussi un peu une famille qui se retrouve.
Je vais essayer durant ces quelques jours, dans la mesure du possible, de rendre compte des débats. Les tweets, pollués par les haineux et limités par les contraintes techniques ne me semblent pas le bon moyen de faire partager les travaux et mes réflexions. C’est donc le bon vieux format du billet de blog que je vais utiliser.
Avant même le début de ces rencontres, commençons par revenir sur cette expression curieuse d’«éducation nouvelle», son histoire, son présent et les défis à relever...


Une éducation pas si nouvelle.
Avec vous vu le très beau documentaire “Révolution école” ? Ce film de Joanna Grudzinska, basé sur de nombreuses archives inédites, retrace l’histoire de la  Ligue internationale de l’Éducation nouvelle durant l’entre deux-guerres.  Ces rassemblements internationaux rassemblent à l’époque des pédagogues et des pédagogies toujours bien connues aujourd’hui, Montessori, Steiner, Freinet, A.S. Neill (Sumerhill), Janusz Korczak...
Cliquez pour agrandir...
Ces personnes ne sont pas forcément toutes d’accord entre elles. On voit même apparaitre rapidement des débats qui sont toujours vifs aujourd’hui. Mais ils s'accordent dès 1921 sur une définition qu’il est utile de rappeler : « L’éducation nouvelle consiste à favoriser le développement aussi complet que possible des aptitudes de chaque personne, à la fois comme individu et comme membre d’une société régie par la solidarité. L’éducation est inséparable de l’évolution sociale; elle constitue une des formes qui la déterminent. Le but de l’éducation et ses méthodes doivent donc être constamment révisés, à mesure que la science et l’expérience accroissent notre connaissance de l’enfant, de l’homme et de la société . »
En fait, cette réflexion sur l’éducation commence dès la fin du 19ème siècle mais elle trouve une acuité plus importante après le traumatisme de la Première guerre mondiale (ce que montre très bien le documentaire “Révolution école”). C’est bien un projet politique qui s’exprime autour des idées d’émancipation, de coopération et de solidarité.
« L’éducation nouvelle prépare, chez l’enfant non seulement le futur citoyen capable de remplir ses devoirs envers ses proches et l’humanité dans son ensemble, mais aussi l’être humain conscient de sa dignité d’homme. » (principe du groupe français d’éducation nouvelle)
C’est aussi l’idée forte que chaque individu est éducable et capable si on lui en donne les moyens. Ce que résume très bien le premier des « principes qui guident notre action » formulé en 1957 par Gisèle de Failly, l’une des fondatrices des CEMEA : «Tout être humain peut se développer et même se transformer au cours de sa vie. Il en a le désir et les possibilités. » On retrouve aussi la même idée dans le slogan du GFEN « Tous capables » ou dans le postulat d’éducabilité formulé par Philippe Meirieu. Cela semble aujourd’hui une évidence ? Pas si sûr, à l’heure où le fatalisme social et l’idéologie des dons ou du mérite individuel fait un retour en force.
“Agir” c’était l’autocollant que j’avais mis à l’arrière de ma première voiture alors que j’étais animateur de centre de vacances et formateur (à l’époque on disait encore instructeur) aux CEMEA. C’était un des slogans de ce mouvement et j’en aimais la polysémie. D’abord évidemment parce que je me définis comme un militant ou un « activiste » en tout cas quelqu’un qui ne se résigne pas à un état de fait et qui cherche à faire advenir une situation meilleure. Mais aussi parce que l’activité est au cœur de la pédagogie nouvelle. L’enfant est un être social et il apprend par la coopération et la confrontation à des situations et des expériences personnelles et collectives. L’enjeu pour l’enseignant, l’éducateur, c’est de créer un « milieu », des dispositifs qui permettent de construire ces apprentissages. Faire apprendre plutôt que « transmettre ». Aujourd’hui encore, cela ne va pas de soi. La passivité, l’inculcation, l’ « école assise » pour reprendre une vieille expression, revêtent de nouveaux atours mais continuent à être la règle dans bon nombre de classes. 
Une autre caractéristique essentielle de l’éducation nouvelle c’est l’idée que l’éducation est globale. On envisage l’enfant dans toutes ses dimensions et pas seulement l’élève. L’éducation ne peut être seulement « scolaro-centrée ». C’est la raison pour laquelle, les associations complémentaires de l’école sont une partie importante de ce réseau et de ce courant de pensée. C’est pour cela que les centres de vacances et de loisirs, les activités péri-scolaires ou culturelles ont été investis par les militants de l’éducation nouvelle.


Des idées vivantes et menacées
Les mouvements d'éducation nouvelle ont donc une histoire. Mais ils ont aussi un présent. Mais le fait même que le qualificatif « nouveau » soit toujours utilisé pose question et montre bien que leurs valeurs restent précaires . Dans ces temps troublés où les repères habituels ne sont plus toujours pertinents, où le populisme éducatif se développe et où la « réforme » est vue comme une menace et la remise en cause d’un certain nombre d’acquis, les risques sont nombreux pour l’éducation nouvelle.

Le premier risque est de se transformer en une sorte de musée de la pédagogie ou de « réserve d’indiens ». C’est un réel danger qui est renforcé par les attaques contre les « pédagos ». On risque alors dans les mouvements pédagogiques de cultiver une sorte de repli et d’entre-soi rassurant pour se protéger. La pureté cultivée en circuit fermé conduit au complexe de l’assiégé et du « juste » avec parfois une forme d’arrogance. L’enjeu c’est celui de l’ouverture et de l’engagement dans le monde, dans la société. Le système éducatif a besoin des militants de l’éducation nouvelle partout où il est question de lutter contre l’échec scolaire, l’évaluation et la sélection précoces, l’activité sans but ni sens...  
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Comme le dit  le slogan du CRAP « changer l’école pour changer la société, changer la société pour changer l’école » on ne peut envisager l’un sans l’autre. Ce que dit aussi cette citation de Celestin Freinet : « Nous ne comprendrions pas que des camarades fassent de la pédagogie nouvelle sans se soucier des parties décisives qui se jouent à la porte de l’école ; mais nous ne comprenons pas davantage les éducateurs qui se passionnent, activement ou plus souvent passivement, hélas ! pour l’action militante, et restent dans leur classe de paisibles conservateurs, craignant la vie et l’élan, redoutant l’apparent désordre de la construction et de l’effort.» (Célestin Freinet, L’Éducateur prolétarien n° 1, oct. 1936)

L’autre danger est paradoxalement celui de l’établissement. Comme je l’ai déjà souligné dans des billets précédents, il y a vis-à-vis de la pédagogie « nouvelle », une sorte d’inversion des valeurs. Ce discours “pédago” qui était un discours de rébellion du temps de Freinet (obligé de quitter l’EN pour mener à bien son projet)  est devenu aujourd’hui un discours “officiel”. On peut considérer qu’il ne s’agit que d’une vulgate mal digérée et plaquée sur une structure qui reste bureaucratique et rigide mais il est clair que les mots et les concepts qui étaient ceux de l’éducation nouvelle sont aujourd’hui aussi ceux du ministère, de l’inspection, de l’OCDE… Et donc le pédagogue n’apparait plus comme le “rebelle” mais, aux yeux de certains, au contraire comme l’allié objectif du pouvoir.
Cela a pour effet que le conservateur peut se tailler à bon compte un costume de rebelle face à l’institution. Et cela fait malheureusement sens pour des enseignants qui ont toujours vécu leur métier comme un métier indépendant et individualiste et avec beaucoup de méfiance à l’égard de la hiérarchie.
L’enjeu c’est de conserver (ou de retrouver) cet esprit d’innovation et de rébellion tout en agissant aussi pour transformer l’école, ici et maintenant. La radicalité révolutionnaire peut aussi conduire à un splendide isolement évoqué plus haut.

Enfin, l’éducation nouvelle s’incarne aujourd’hui dans des mouvements et associations qui comme toutes les structures sont confrontés au manque de moyens, à des problèmes de subventions, de vente de leurs « produits », d’emplois etc. En d’autres termes, les problèmes de « boutique » et les logiques économiques peuvent l’emporter sur la nécessité du débat d’idées et la réflexion sur les pratiques. Pour avoir été président d’association, je peux témoigner que ce risque est grand que l’urgence l’emporte sur l’essentiel.
Il s’agit de se doter des moyens de l’autonomie financière (et donc aussi politique) pour éviter de tomber dans la course aux subventions et à une recherche de ressources chacun pour sa propre “boutique” qui fasse oublier la réflexion collective. A cet égard, il faut saluer cette initiative de créer une biennale qui montre que la réflexion pédagogique est bien vivante.



Des défis pour demain
Les mouvements d'éducation nouvelle ont donc une histoire. Ils ont un présent. Il faut aussi écrire leur avenir.
Gisèle de Failly, déjà citée, écrivait : « Les fondateurs de l'éducation nouvelle ont eu, dès l'origine, ce souci de souligner que leurs réflexions, les idées auxquelles ils aboutissaient étaient valables fondamentalement, mais qu'elles étaient non seulement susceptibles de progresser et de s'enrichir, mais qu'il était indispensable et inévitable qu'elles se transforment ».
La réflexion pédagogique ne peut se complaire dans le passé même si celui-ci est une boussole indispensable. Il lui faut tenir compte des évolutions actuelles.
Il ne s’agit pas ici pour moi, de préjuger de ce qui se dira durant cette biennale. Mais il me semble qu’il faut aujourd’hui répondre à un certain nombre de défis qui ne se posaient pas dans les mêmes termes il y a cent ans...

En premier lieu c’est la question de la lutte contre les inégalités qu’il faut sinon re-questionner du moins reformuler. C’est ce que nous invite à faire François Dubet dans un texte récent, qui me semble  un bon point de départ à la réflexion. Alors que le ministre actuel ne cesse d’évoquer pour le critiquer, l’ « égalitarisme » et semble privilégier une approche individuelle des inégalités au détriment de la prise en compte des inégalités sociales, il est important que nos mouvements se reconstituent une réflexion sur cette question.

Les neurosciences semblent être devenues aujourd’hui la nouvelle panacée et l’horizon indispensable de l’ « efficacité » pédagogique. L’éducation nouvelle s’est toujours appuyée sur les travaux de la recherche. D’ailleurs il est intéressant de constater que bon nombre de concepts mis en avant par les recherches récentes ne font que confirmer les intuitions des grands pédagogues. Comment intégrer ces nouveaux apports sans tomber dans le scientisme et en laissant le dernier mot aux praticiens pour mettre en œuvre une pédagogie qui n’oublie pas les autres sciences mais aussi les valeurs

J’ai beaucoup agi et écrit autour de la question de l’innovation. Je ne vais pas ici y revenir longuement. Mais cet aspect doit être lui aussi redéfini alors que le terme devient un repoussoir pour une bonne partie de l’opinion enseignante. Et cela, nous renvoie aussi à la définition du périmètre de cette innovation. Ce qui semble se développer aujourd’hui c’est tout un secteur privé qui prospère sur les lacunes et les difficultés du secteur public à se réformer. Cette question n’est pas neuve. Il faut rappeler que dès l’origine, une partie de l’éducation nouvelle s’est faite dans des écoles privées. Il faut donc clarifier nos positions sur la marchandisation de l’école sans anathèmes mais avec fermeté redire notre attachement à une école publique qui évolue au service de tous...


Philippe Watrelot

Le jeudi 2 novembre 2017

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Les billets consacrés à la Biennale internationale de l’éducation nouvelle

Billet n° 2 : Sciences et pédagogie
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mercredi, octobre 18, 2017

La fabrique des programmes de Sciences économiques et sociales (et au delà...)



En juin 2016, à la suite d’une demande portée par les syndicats d’enseignants et l’association disciplinaire, les programmes de Sciences économiques et Sociales de seconde sont allégés. Jusque là, les enseignants devaient traiter en 1h30 par semaine, huit questions (sur les 10 inscrites au programme) et cinq obligatoirement, on passe alors à six questions dont quatre obligatoires.
C’est le chapitre sur le marché qui perd son caractère obligatoire. Cela déclenche une polémique orchestrée par l’ancien patron Michel Pébereau membre du Conseil National Éducation Économie (CNEE) et de l’Académie des sciences morales et politiques (ASMP).
La ministre décide alors de créer une commission mixte rassemblant des membres du CNEE et du Conseil supérieur des programmes (CSP) pour produire un « avis sur les compétences et connaissances que doit maîtriser un élève ayant suivi un enseignement de SES au lycée ». 
Cette commission aurait du initialement  rendre son rapport en décembre 2016. Après des manœuvres d’obstruction (démission de membres du CNEE dont M. Pébereau) le travail de cette instance originale n’a pu démarrer qu’en janvier 2017 et le rapport sera finalement remis en octobre 2017 après une quarantaine d’heures d’audition (et un changement de ministre...).
J’ai fait partie de cette commission, invité par le CSP. Si j’ai déjà écrit sur ma vision des SES, je voudrais ici plutôt faire part de ma réflexion sur la fabrique des programmes à la suite de ce travail.



Le buzz, les polémiques et les programmes
J’ai déjà évoqué dans un autre article les attaques récurrentes contre les SES. On a d’ailleurs un peu l’impression d’une réédition de ce qui s’est produit dans les années 2000 avec les mêmes protagonistes à la manœuvre. Les SES partagent avec l’enseignement de l’Histoire le triste privilège d’avoir un statut particulier dans le débat sur l’École avec le même procès en “idéologie” et des groupes de pression qui s’intéressent de très près à cet enseignement.
Il est d’ailleurs significatif qu’on ait cru bon de créer une commission ad hoc alors que c’est normalement du seul périmètre du Conseil Supérieur des Programmes de s’intéresser à la fabrication des programmes.
Le point de départ de la polémique, cette fois ci, trouverait sa source dans la décision en juin d’alléger le programme de seconde en ne rendant plus obligatoire le chapitre sur le marché. On peut dire que cette indignation a été surjouée d’autant plus quand on sait que l’académie des sciences morales et politiques (présidée par Michel Pébereau) s’était auto-saisie d’une (nouvelle) réflexion sur les manuels de SES dès le mois de mars...
Ce qui est intéressant c’est aussi de constater qu’après ce buzz qui a conduit à la saisine, les excès sont retombés. Les travaux de l’ASMP ont montré que les manuels lus par des universitaires et des économistes d’entreprise étaient globalement reconnus comme sérieux et rigoureux. De même les recommandations formulées sont beaucoup plus mesurées que le laissait présager l’emphase du début.
Mon propos n’est pas ici de revenir sur le détail des reproches mais plutôt de comprendre comment les polémiques médiatiques et le travail des groupes de pression interférent sur la fabrication des programmes. Les ingrédients sont à peu près toujours les mêmes. On a d’abord une lecture partielle et partiale des manuels qu’on confond avec les programmes. On a même une double illusion d’optique puisqu’on confond aussi les manuels avec les pratiques réelles des enseignants en classe. Ensuite, on s’appuie sur des réseaux et des institutions qui permettent de médiatiser le débat. On peut faire appel, selon les cas et les disciplines, au « bon sens » ou à la «déconnexion avec la réalité» pour justifier la critique des programmes. Le reproche d’ « idéologie » est aussi très fréquemment utilisé. Mais ce reproche peut être facilement retourné. « L’idéologie, c’est l’opinion de mon adversaire » disait Raymond Aron. Il ne s’agit pas de « faire aimer » l’entreprise (tout comme il ne s’agit pas de faire « aimer la France »). L’enjeu est de donner des outils conceptuels pour bien la comprendre.
Au final, une polémique sur les programmes repose sur une mécanique alimentée par une méconnaissance des pratiques des enseignants, une remise en cause de la légitimité des instances chargées d’élaborer les programmes au nom d’une supposée “expertise” qui souvent n’a rien à voir avec l’école.
En tout cas, cet épisode nous montre bien la nécessité d’une instance indépendante des groupes de pression et même du pouvoir politique dans la fabrication des programmes.



Les experts, les profs et les élèves
La polémique a en effet été lancée par des personnes issues du monde de l’entreprise. Durant nos auditions nous avons aussi entendu de nombreux universitaires.
En tant qu’enseignant en exercice en lycée, seul de mon espèce, mon étonnement a été de constater qu’un débat en cachait un autre. Tous ceux qui croyaient parler d’économie et faisaient des recommandations sur ce sujet parlaient en fait, sans le savoir et sans en avoir une réelle connaissance, de pédagogie en s’appuyant sur des présupposés implicites (et très discutables…) de ce que sont les mécanismes d’apprentissage et les jeunes de quinze à dix-huit ans...
L’excellence académique ou la position institutionnelle n’est en rien la garantie d’une expertise dans le domaine éducatif.
On a l’impression que, le plus souvent, les programmes sont construits sous forme d’injonctions et d’énumérations de concepts à transmettre. Or, il faudrait que les programmes se préoccupent plus de ce que les élèves « apprennent » (vraiment) que de ce que les enseignants « transmettent ». 
Le décalage entre le prescrit et le réel est un grand classique du fonctionnement des institutions. Cela agit à deux niveaux : au niveau des élèves comme nous venons de l’évoquer mais aussi au niveau des enseignants. Ma conviction est qu’on ne peut bouleverser la culture propre à un groupe professionnel trop brusquement. C’est d’ailleurs pour cela qu’un programme est souvent une forme de palimpseste : on réécrit sur un document déjà existant et on le modifie progressivement.


Quelle autonomie des disciplines scolaires ?
Les SES souffrent d’un défaut aux yeux de plusieurs de ses critiques: c’est une discipline « bâtarde ».  Elle s’est construite il y a cinquante et un ans sur une logique de croisement des disciplines et de pluri-disciplinarité. J’ai souvent et longtemps dit et écrit que le mot le plus important pour définir la discipline et le plus difficile à faire vivre était la conjonction : « sciences économiques ET sociales». Les SES n’existent pas dans l’enseignement supérieur où l’on trouve de l’économie, de la sociologie, de la science politique, etc.
Ce débat est certes aujourd’hui un peu dépassé et tous les enseignants de SES s’accordent sur le fait qu’il y a ces trois disciplines  de référence et sont très soucieux de la rigueur scientifique et de rester informés des débats et des progrès dans ces domaines. La légitimité des SES est d’abord liée à cet ancrage disciplinaire. Les différentes générations de programmes ont marqué de plus en plus ce lien avec des champs disciplinaires distincts même s’ils subsistent des « regards croisés ».
Mais le débat sur l’identité des disciplines scolaires demeure pertinent et mérite toujours d’être posé.
Pour certains, une discipline scolaire se définit parfois comme une version allégée et simplifiée d’une discipline enseignée à l’université. Dans la mesure où le système éducatif s’est construit par le haut, une bonne partie des disciplines de l’enseignement secondaire long auraient été conçues comme des préparations à des enseignements universitaires. C’est ce que certains appellent de manière abusive, la “transposition didactique.”
Mais cela est loin d’être évident pour toutes les disciplines. Et l’histoire ou la comparaison internationale nous montrent que les frontières entre enseignements sont mouvantes. Certaines disciplines ont été scolaires avant d’être universitaires : la grammaire, la technologie, la géographie, l’éducation physique, les arts, la musique ont été des disciplines scolaires avant de devenir des disciplines universitaires. Dans ses travaux sur l’histoire des disciplines scolaires, André Chervel (La culture scolaire. Une approche historique, Paris, Belin, 1998), montre que celles ci sont des constructions qui répondent à une diversité de logiques et aux impératifs de chaque époque. Les disciplines sont donc des ensembles flous et mouvants. Il montre aussi que celles ci sont autonomes et ont leur logique propre face aux disciplines universitaires.
Quelle est l’autonomie des disciplines scolaires par rapport aux disciplines universitaires ?  Doivent-elles en être le parfait décalque ou peut-on concevoir une originalité et une spécificité des disciplines scolaires ? Ces questions ne se posent évidemment pas que pour les SES mais elles prennent une acuité particulière pour un enseignement confronté depuis longtemps à des tensions au sein de l’enseignement de l’économie et à des débats sur la place des autres sciences sociales.


Quelle place pour le lycée aujourd’hui ?
Au delà de la question de l’autonomie des discipline scolaires, se pose celle de la place du lycée aujourd’hui dans le cursus scolaire.
L’enseignement des SES au lycée est-il un enseignement de « culture générale » (ou plus précisément pour éviter les ambigüités éventuelles du terme un « enseignement de culture commune »), ou est-il un enseignement préparant aux études supérieures alors que la technostructure de l’EN répète comme un mantra « Bac-3 / Bac +3 » ?
Cette question a été posée à plusieurs reprises au cours des premières auditions. Certains considèrent que les disciplines scolaires ont une très faible autonomie par rapport aux disciplines universitaires et qu’elles tirent leur légitimité de cette connexion forte. Et dans cette perspective ils voient l’orientation d’une manière assez mécanique : faire de l’économie  dans le secondaire conduirait à faire de l’économie dans le supérieur.  D’autres considèrent que le lycée ne peut se réduire à une propédeutique et qu’il  a une fonction spécifique de formation du citoyen et de culture commune complémentaire de ce qui se fait au socle commun au collège et au primaire. Ce débat n’est pas de pure théorie, il est très pratique car il pose notamment  la question de l’évaluation terminale (autrement dit le bac) mais aussi celle de la réalité de l’orientation post-bac.
Pour ma part, je considère qu’il faut placer le curseur dans une position médiane : il ne s’agit pas seulement de former le bachelier mais aussi le citoyen.


Qu’est-ce qu’un bon programme ?  
La saisine initiale demandait un « avis sur les compétences et connaissances que doit maîtriser un élève ayant suivi un enseignement de SES au lycée ».
Cette demande n’a pas forcément été au cœur de nos travaux car d’autres questions et notamment la place des SES en Seconde ont (beaucoup trop) occupé la réflexion. De plus, il ne s’agissait pas dans cette commission d’être dores et déjà dans un travail de confection de nouveaux programmes ni même d’évaluation détaillée des programmes actuels. Toutefois, on peut remarquer que si des allègements ont été effectuées (en 1ère et Terminale dès 2013 et en 2016 pour la 2nde ) c’est bien parce que se pose un problème de « lourdeur » des programmes :  85 notions à maîtriser en Première et 77 en Terminale . Comme c’est le cas pour d’autres, le programme de SES se définit essentiellement par les notions, d’où l’expression souvent utilisée de “dérive encyclopédique”. Plusieurs personnes auditionnées ont aussi souligné le fait que cette approche notionnelle se faisait au détriment de la compréhension des mécanismes et de la relation entre ces différentes notions. De plus, cet empilement laisse peu de marges de manœuvre aux enseignants.
Une anecdote avant de poursuivre cette réflexion sur les programmes. J’avais été frappé il y a quelques années par la présentation qui avait été faite du système éducatif néo-zélandais par une enseignante de ce pays. À un moment, elle sort de son sac, une petite brochure assez fine et nous la présente comme étant l’ensemble des programmes de la scolarité obligatoire dans son pays. Je n’ose imaginer l’épaisseur qu’aurait le même document pour notre propre pays !
Se demander ce qu’est un bon « programme » c’est donc aussi et surtout se demander ce qui est faisable et faire confiance aux enseignants. Mais, cela ne peut fonctionner que si on questionne et fait évoluer les modalités d’évaluation.


Qu’évaluer ?
Le constat qui est revenu à plusieurs reprises est que le baccalauréat pouvait être amélioré : les épreuves actuelles favorisent un peu trop le bachotage et la récitation au détriment de la réalisation de tâches plus complexes. Une évolution des épreuves du bac pourrait être l’occasion de plus mettre l’accent sur les capacités d’analyse et de synthèse, sur l’argumentation, sur la résolution de problèmes, la recherche d’informations, éventuellement le travail de groupe. On pourrait ainsi développer les compétences utiles pour favoriser l’“esprit d’entreprendre” (ce qui serait un moyen de sortir par le haut de cette polémique).
Au risque de provoquer, je pense que l’école et en particulier les enseignants de SES peuvent contribuer à développer l’esprit d’entreprendre (et pas seulement d’ « entreprise »). Mais pas par l’inculcation d’un « catéchisme ».  Il faut constater que l’école est trop souvent encore dans la transmission de haut en bas de savoirs incontestables, la faible valorisation de l’initiative et du travail collectif. Si l’on veut que l’école encourage l’esprit d’"entreprendre", il faut au contraire qu’elle valorise et développe l’autonomie des élèves, leur prise d’initiative, leur sens critique, aussi bien individuellement qu’en groupe, car une "entreprise" qui réussit n’est pas seulement une aventure individuelle mais le fruit d’un projet collectif.
Une autre piste intéressante pour l’évaluation nous renvoie à ce qui fait la spécificité de la pédagogie des SES depuis sa création : l’usage de documents (textes et statistiques). Mais aussi à ce qui est au cœur de la démarche scientifique des savoirs de référence : le traitement des données. Cela est en effet présent aussi bien en économie qu’en sociologie ou en sciences politiques. Faire travailler les élèves (et évaluer leurs compétences acquises) autour de ces questions correspond à des pratiques déjà en vigueur chez les enseignants de SES et leurs collègues de mathématiques. A l’heure des fake news et de la remise en cause de toute information, au moment aussi où la maîtrise des données devient un enjeu non seulement économique mais aussi politique, c’est une direction de travail pour les enseignants et un atout non seulement dans la formation du bachelier futur étudiant mais aussi du citoyen. 
Il ne s’agit pas de « refonder » l’enseignement des sciences économiques et sociales mais de se  (re)concentrer sur ce qui est vraiment fondamental : la compétence des élèves à questionner la société et à en comprendre les déterminants, à décrypter l’actualité et les données , à prendre part au débat citoyen en maîtrisant l’argumentation et la synthèse. Cela n’exclut pas les connaissances bien au contraire puisque les compétences ne sont, au final, que des savoirs mis en action. Mais cela permet de recentrer les apprentissages et leur évaluation et de redonner de la marge de manœuvre aux enseignants.
Alors qu’une réflexion va s’engager sur ce point, nous devons constater (et ce n’est pas propre aux SES que notre système éducatif est largement piloté par l’aval et donc la nature des épreuves terminales. Si l’on veut que la pédagogie évolue ou qu’elle retrouve sa place dans un système moins contraint, on ne pourra faire l’économie d’une réflexion sur les épreuves certificatives, c’est-à-dire le baccalauréat.


Intéresser les élèves est-il une finalité ou un point de départ ?
La structuration d’un programme renvoie aussi à une question implicite : celle de la manière de rentrer dans les apprentissages. L’idée souvent répandue est qu’il faudrait d’abord passer par les fondamentaux avant de complexifier ensuite. Cette approche linéaire de l’apprentissage semble relever du bon sens. Mais la pédagogie est quelquefois « contre-intuitive ».
Sans rentrer dans un débat épistémologique et didactique, on peut rappeler que c’est bien souvent le fait que les apprentissages permettent de répondre à des “questions vives”, à des questions qui font sens pour les élèves et déclenchent la curiosité. C'est en abordant des objets complexes qui ont du sens qu'on va ensuite pouvoir approfondir les concepts et pas l'inverse. Les apprentissages, y compris dès le primaire, sont souvent un aller-retour entre le simple et le complexe. Les "fondamentaux", c'est comme si on disait aux élèves qu'avant de jouer de la musique il faut qu'ils fassent au moins trois ans de solfège!
C’est aussi la raison pour laquelle la pluridisciplinarité n’est pas un supplément mais un élément clé de la compréhension et de la motivation. Un bon exemple en est donné par l’entreprise. Le reproche qui a souvent été fait aux SES c’est de ne pas assez en parler. Or, l’entreprise est partout dans les programmes, mais dispersée dans plusieurs chapitres et raccrochée à plusieurs approches scientifiques. On pourrait recomposer les chapitres pour rassembler des questions éparses et les rendre plus visibles.
Au delà du cas particulier des SES, c’est notre manière de faire les programmes qui est questionnée. Des questions sont bien souvent négligées ou implicites comme celle des manières de concevoir les apprentissages ou encore les ressorts de la motivation.


Une discipline exemplaire
On le sait, les questions d’éducation sont toujours ou presque des questions systémiques. A partir d’un point qu’on croit particulier et spécifique, on peut tirer le fil de l’ensemble du système...
La saisine sur les SES en a été une parfaite illustration. C’est un bon analyseur du système qui  a permis de soulever de très nombreuses questions qui dépassent le cadre initial :
- quelle organisation générale du lycée (quelles filières ? quels objectifs ?)
- qu’est-ce qu’une culture commune ?
- qu’attend t-on des élèves ?
- qu’est-ce qu’un bon programme ?
- Qu’est-ce qu’une discipline scolaire ?

J’ai essayé de répondre plus haut, aux derniers points.
Les questions qui sont posées avec ce débat récurrent sont celles de l’indépendance des programmes par rapport aux lobbys de toutes sortes, de la finalité de l’enseignement (faut-il faire aimer l’entreprise —ou la patrie — ou délivrer des connaissances qui permettent de comprendre ? ) et enfin, comme je l’ai déjà dit, celle de l’autonomie et de la logique propre des disciplines scolaires qui ne peuvent être un simple décalque des savoirs savants et universitaires. Ces questions là, au final, intéressent toutes les disciplines.
Derrière le débat sur les SES, il y a, aussi un débat pédagogique bien plus large qui nous renvoie à la manière dont on apprend et dont on fait rentrer les élèves dans les apprentissages et dont on les motive. C’est aussi la question de l’évaluation terminale qui est posée dans la mesure où elle détermine la pédagogie en amont.

Sur les deux premiers, qui nous ont beaucoup occupé, le danger était de faire « payer » à une discipline les contradictions de l’ensemble de la réforme du lycée de 2009-2010. Par exemple, les cours en Seconde sont un vrai/faux enseignement d’exploration mais cela résulte de compromis boiteux refusant une place dans le tronc commun que les SES subissent sans en être responsables. On voit là que la place d’une discipline est le résultat de rapports de force et de stratégies souvent complexes. De même le lycée « Descoings-Chatel » n’a pas réussi à faire disparaitre la hiérarchie des disciplines qui était pourtant au cœur du projet. L’une des limites du rapport est qu’il raisonne à « système constant » mais il est bien clair qu’une réforme du lycée reposerait le problème autrement. Mais cela est une autre affaire...


La participation à une telle instance est un des exercices les plus complexes que j’ai pu faire au cours de ces dernières années (bien plus que la présidence du Cniré !). C’est un exercice ingrat fait de patience, d’écoute et de négociation voire de diplomatie. Je sais pertinemment que cela expose et qu’on y prend plus de coups que de compliments. 
Le rapport final est un texte de compromis et nuancé et à l’heure où on aime les débats binaires et ranger les gens dans des cases dont il est difficile de sortir (surtout dans le tout petit monde des SES...)  on court le risque d’un mésusage et d’une mauvais interprétation. Il faut l’assumer même si on peut le regretter à l’avance.
Mais cela a été aussi un moment intéressant pour plusieurs raisons. D’abord parce que cette instance m’a permis de fréquenter des personnes de qualité et de frotter mes arguments aux leurs et d’éprouver mes propres analyses et mes convictions. Ensuite parce que les auditions m’ont donné une vision plus large des questions concernant cette matière que j’enseigne depuis 36 ans et pour laquelle je suis formateur depuis plus de dix ans. Enfin, parce que cette expérience que j’ai acceptée avec circonspection et inquiétude m’a permis d’apprendre et, à ma modeste place, de ne pas rester spectateur et de contribuer au débat et à l’action...




Note : ce rapport sur l'enseignement des SES n'a pas encore été remis au Ministre. Si malgré cela, je m'autorise ce billet ici même c'est pour deux raisons :
- Il a "fuité"(et je le déplore) et deux articles de presse (Café Pédagogique, Le Monde) en parlent déjà. Le rapport est donc déjà commenté.
- je ne m'exprime pas ici sur le rapport lui même mais sur ses “à-côté" et tout ce que m'inspirent les travaux menés durant tous ces mois. Il va de soi que ces considérations se font à titre purement personnel et n'engagent en rien l'ensemble de la commission.



Une version "courte" de ce billet de blog est parue dans le n°3 du Magazine de l'Éducation



- AJOUT DU 11 DÉCEMBRE : le rapport a (enfin) été mis en ligne sur les pages du Conseil Supérieur des Programmes. Je n'ai pas d'informations sur sa remise "officielle" au Ministre. Étant enseignant et militant, je suis habitué aux causes perdues (!). Mais il n'empêche que, si on ne tenait aucun compte de ce rapport dans un futur travail sur les programmes de SES, il y aurait de quoi être déçu devant si peu de considération pour le travail accompli... Et il y aurait aussi de quoi être inquiet !




Philippe Watrelot



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